L'art est ce par quoi les formes deviennent style

Assise dans l'herbe, les jambes en tailleurs, j'ai l'impression de méditer. Si mon ordinateur n'était pas posé sur mes jambes, je pourrais m'évertuer à arracher l'herbe du sol, sans m'en rendre compte. Simple tic nerveux que j'ai acquis en regardant les autres faire. Au final, je suis peut être aussi psychotique qu'eux. Je regarde autour de moi. Ce que je vois a plus de sens que ce que j'entends. De toute façon, sans mes appareils auditifs, je n'entendrais pas grand chose, ce qui a le don de me déplaire d'ailleurs. Plutôt que l'ordinateur, j'avais voulu opter pour un bloc note: petit, discret, et sans avoir besoin d'une quelconque prise électrique pour recharger les batteries. Mais mon écriture était trop brouillon pour que je sois capable de me relire par la suite, et j'avais peur que les idées ne fusent trop rapidement.
C'était d'ailleurs pour qu'elles fusent que j'étais là. Généralement, je ne les inscrivais pas aussi vite qu'elle venait, mais plutôt aussi vite que Candice me les disait. Elle avait toujours une bonne idée pour mon blog, et je ne l'en remerciais jamais assez, même si elle m'assurait souvent être certaine de ma profonde gratitude. D'autant qu'elle avait toujours les bonnes idées, faisait toujours de magnifiques photos et que mon blog ne parlait pas que de mode, grand merci, sinon il aurait fallu qu'elle me prenne en photo, et l'exercice serait difficile.
Si d'habitude j'entendais les gens parler, je ne les comprenais vraiment que lorsque je lisais sur leurs lèvres. Alors poser et essayer de comprendre ses directives... imaginez un peu la scène!
Ecrivant quelques mots rapides, je me tournais finalement vers la villa où habitait Candice.
Travailler toute seule ne m'aidait pas vraiment, et j'aimais les photos qu'elle pouvait faire. Elles me parlaient. Alors, d'un pas décidé, je me rendis chez elle, prête à aller la chercher si vraiment il le fallait. Vu le jour et l'heure, j'espérais qu'elle serait là, bien que je redoutais l'instant où je me retrouverais très certainement devant un de ses colocataires, ce qui ne m'enchantait guère.
Je me dirigeais alors vers l'imposante demeure et toquait trois coups discrets, ne sachant pas vraiment si je voulais qu'ils soient entendus si Candice n'était pas là. Finalement, avec soulagement, je constatais que c'était elle qui vint ouvrir. « Coucou, tu vas bien? Je ne te dérange pas j'espère ? »

«La vie imite l'art bien plus que l'art n'imite la vie »

C’est une journée banale qui commençait pour Candice, elle s’était permise de se lever tard, exceptionnellement elle n’avait pas cours aujourd’hui. Elle avait eu la surprise de se voir que ses colocataires avaient déjà quitté la villa, elle ne savait pas où ils étaient parti mais cela l’arrangeait d’une certaine manière. Elle avait toute la maison pour elle tout seule et elle avait bien l’intention d’en profiter. Elle prit un petit déjeuner copieux puis se mit sur le sofa et regarda la tv. Les heures passaient et la jeune demoiselle n’avait toujours pas bougé. Une journée à ne rien faire, ce n’était pas dans l’habitude de Candice. D’ailleurs, celle-ci commençait à s’ennuyer toute seule, n’ayant aucune force pour faire quelque chose de très productif, elle décida de retaper ses notes pour se mettre en ordre. Toutefois, elle fut arrêté dans son élan lorsqu’elle entendu quelqu’un frappé à la porte. Elle n’attendait personne, sûrement quelqu’un pour un de ses colocataires, dommage, il n’y avait personne. Quelle ne fut pas sa surprise lorsqu’elle vit Sunee, celle-ci était l’ancienne guide de Candice à l'Université, bien qu’elle avait arrêté, les deux demoiselles avaient gardé contact. Ce fut une agréable surprise pour l’apprenti photographe qui commençait à s’ennuyer toute seule dans cette grande maison.

« Me déranger ? Je dirais plutôt que tu arrives au bon moment, allez entre !»   Elle entraîna son amie à l’intérieur et l’invita à entrer dans le salon. Elle ne lui avait pas laissé le temps de dire quoi que se soit, que les deux jeunes filles s’étaient retrouvé assisse sur le fauteuil.  « Alors, que me vaut l'honneur de ta visite ? »  

L'art est ce par quoi les formes deviennent style

Avec Candice, les idées semblent venir toutes seules, être innées. C'était pourquoi, en voyant que je n'arrivais à rien, la seule solution qui m'était venue était d'aller la voir. Je me doutais bien que me rendre chez elle serait totalement différent de ce que j'avais l'habitude.
Dans le silence de sa villa, avec ou sans ses colocataires, je n'aurais pas besoin de me concentrer sur l'articulation de ses mots, et ça me plaisait. Je n'aurais juste qu'à écouter et écrire, ou, si nous faisions autre chose, à ne pas parler en même temps qu'elle.
C'était l'avantage de l'opération que j'avais subie. Certes, j'entendais beaucoup mieux avec mes appareils, mais mon ouïe avait progressé et je ne m'en portais que mieux. Pas besoin, donc, d'augmenter le volume de ces choses que je voulais enlever définitivement, sans jamais vraiment le pouvoir.
Pointée devant sa porte, j'avais demandé à Candice, afin d'en avoir le coeur net, si je la dérangeais. Apparemment pas. Je souris, mais n'eus pas pu le temps de répondre que déjà elle me faisait entrer et nous nous retrouvions assises l'une à côté de l'autre sur le fauteuil.
« Eh bien, j'étais dans le parc juste en face, en train de chercher des idées pour mon blog quand je me suis dit que je pouvais passer te voir ! » Ce n'était pas un mensonge, cependant, cela sous entendait bien que j'étais venue dans l'idée de me mettre à travailler avec elle, mais que c'était à elle de choisir. Car je n'avais aucune envie de la contraindre à m'aider, surtout pas si elle se reposait pour sa fin de semaine.