Ce soir, j’ai trouvé un contrat pour danser dans un des théâtres de la ville. Certes, j’ai pas vraiment d’expérience, mais je suis content d’avoir réussi à passer l’audition même si c’est seulement un remplacement pour une soirée. Ça ne sera pas sans douleur, je ne suis pas un danseur de moderne jazz et je ne le serai sans doute jamais à part entière, mais j’apprends vite et depuis trois jours, je me défonce aux répétitions et chez moi pour réussir à intégrer les mouvements même si je ne suis qu’un backup dancer et rien de bien important, c’est quand même comme une petite pierre qui tient un édifice pour ne pas qu’il penche et devienne disgracieux. J’me sens comme ça, j’ai envie de me valoriser et s’ils pouvaient se permettre d’avoir un danseur en moins, alors, ils n’auraient pas fait d’audition, donc je suis important. J’aime être important. On répète une dernière fois et puis vient le moment de se maquiller et de se changer, même si je n’aime pas spécialement ça, il faut y passer.

Pendant deux heures, c’est intense, mais pendant deux heures, je vis ma passion avec un bonheur immense dans le cœur. Je crois que les gens n’arrivent pas comprendre à moins d’avoir aussi ce quelque chose qui vous pousse à vous dépasser. Moi, je l’ai trouvé et je le fais en ce moment même et j’me suis jamais senti aussi vivant ! C’est tellement bon. Un jour, j’arriverai en faire mon métier, je n’ai que 18 ans, j’ai encore un peu de temps pour paniquer. La représentation arrive à son terme et je vais vers les douches avant de me faire mettre à la porte, salaire en main. « Wut ? » Je papillonne des yeux avant de frapper contre la porte de toutes mes forces ! Non mais ils sont sérieux ? « CONNARDS ! » Ouais, ils le méritent bien ! Et merde… J’enfile mon sweat pour cacher un peu mon corps parce que bon, être en collants de danse et débardeur très moulant, c’est pas l’idéal… La maison n’est pas si loin hein ? Vingt minutes et j’y suis, 10 si je cours, mais je fatigue…

Un sifflement me fait me retourner au bout d’une petite dizaine de mise en route et j’observe la voiture s’arrêter à mes côtés en haussant un sourcil. « Hey regardez, un travesti ! » Quelle bande de cons… Je poursuis mon chemin en secouant la tête avant de soupirer lourdement. Ils arrêtent le véhicule pour en ressortir.

La suite ?

Je redresse la tête doucement en me rendant compte que quelqu’un vient d’arriver dans le petit bureau où on m’a collé à mon arrivé au commissariat. J’ai les menottes, la lèvre en sang, la joue bleue, l’arcade dans un piteux état et des contusions un peu partout. Trois contre un, ça loupe pas. Ils avaient qu’à pas m’insulter. J’observe la femme devant moi, elle est jolie, toute blonde avec des yeux incroyable, on dirait qu’elle est à peine plus âgée que moi, mais sur sa plaque, on voit le mot : Lieutenant… Erf. Je grimace un peu en soupirant. « J’suis désolé d’avoir frappé vot’ collègue, j’me suis pas rendu compte que c’était un poulet. Il a pas le nez trop explosé ? » Parce que je sais que je cogne dur. Ça doit être de famille. Je souris pour marquer l’ironie du truc même si tout mon corps me fait souffrir. J’ai l’habitude d’être là. « Dites, vous êtes belle, si vous êtes aussi sympa que belle, on peut zapper ça et me laisser sortir ? » Je souris, faisant ressortir ma bouille d’hamster avant de grimacer de douleur et d’arrêter mes conneries pour me refoutre dans le fond de la chaise en soupirant.

Six mois ce sont déjà écoulés depuis la dernière fois ou je suis venue ici… Six long mois et pourtant j’ai l’impression que c’était hier… Revenir ici m’emplit d’une certaine nostalgie. C’est bien plus difficile que ce à quoi je m’étais attendue. Je savais que ce serait compliqué… Mais je ne pensais pas que ce serait à ce point… Le cœur serré, je pousse la porte de mon nouveau bureau. Mes collègues ont pris le soin de réunir l’ensemble de mes affaires de mon ancien, pour les poser dans un carton sur mon bureau. Intérieurement je ne peux m’empêcher de les remercier. Je ne suis absolument pas prête à retourner dans mon ancien bureau. Trop de souvenirs… Trop de bons moments… Non, je ne suis pas prête et c’est bien pour cette raison que j’ai fait le choix de reprendre le travail mais en changeant de service. La brigade des stupéfiants est derrière moi…

En silence, je ferme la porte de mon bureau avant d’aller m’asseoir sur mon fauteuil. Je l’observe avec attention, tout en me demandant si un jour je m’y sentirais aussi bien que dans l’ancien. Cette brigade est réputée pour être l’une des plus difficile et je sais que es choses ne seront pas simples. Travailler pour la brigade des mineurs c’est devoir faire face à tous les travers de la société, mais avec des enfants pour victimes… Et parfois pour coupable… Je ne sais pas exactement ce qui m’a poussé à choisir ce secteur, mais je sais que je vais avoir de quoi occuper mes journées et mes nuits.

Doucement, je pousse le carton contenant mes affaires sur le côté. Je n’ai pas envie de m’en occuper pour le moment. Je préfère m’attaquer tout de suite à la nouvelle tâche qui m’incombe… « Alors comme ça on revient sans même venir saluer ses anciens coéquipiers… » Je reconnais immédiatement celle voix d’homme. Je lève la tête et aperçois l’un de mes anciens collègues. Il est vite rejoint par deux autres têtes qui me regardent en sourire. Les voir est un réel bonheur. Sans attendre, je me lève pour aller les voir. « C’est juste qu’on ne mélange pas les torchons et les serviettes. » Mon air sérieux laisse aussitôt place à un sourire et je profite de la chaleur de ses retrouvailles. Pendant l’espace d’un instant, j’oublie les raisons de mon départ pour seulement profiter de ce moment…

« Lieutenant, vous êtes attendue dans le bureau 5 » Je lève la tête et vois une femme me tendre un dossier. Je la remercie aussitôt et elle s’en va. Je fais signe à mes anciens coéquipiers qui comprennent  aussitôt et me laisse. « Passes vite nous voir ! » Je ne réponds pas et me contente de lui faire un sourire. Je ne veux pas faire de promesse que je ne suis pas prête à tenir pour le moment. Le dossier en main, je finis par regagner le bureau 5. A l’entrée de ce dernier, l’un de mes collègues est en train de faire soigner son nez en sang. Il semble totalement furieux… Sans un mot j’entre dans le bureau  ou un jeune homme en piteux état semble comater. En silence je prends connaissance de son dossier. « J’suis désolé d’avoir frappé vot’ collègue, j’me suis pas rendu compte que c’était un poulet. Il a pas le nez trop explosé ? » Je lève la tête vers le jeune homme qui, bien que mal au point, semble reprendre ses esprits. « Je pense qu’il faudra plus de temps pour reconstruire son égo que son nez… »  Je ferme le dossier avant de m’asseoir en face du jeune homme. « Les apparences sont parfois trompeuses… Vu ton dossier déjà assez chargé, je suppose que tu connais l’étape suivante. »  Si jeune et pourtant il semble déjà trop connaître ce genre de situation… Je fais signe au flic à l’entrée de me filer la clé des menottes. Il s’exécute et me les donnes. «  On va aller dans mon bureau et je me chargerai de prendre ta déposition. » Première nuit de garde et déjà un procès verbal à rédiger… Je me lève avant de me diriger vers le dénommer Noah. Je pose une main sur son épaule et l’autre au niveau des menottes pour lui faire signe de se lever. Je sors volontairement par la porte opposée à celle par laquelle je suis entrée histoire d’évier qu’il ne croise mon collègue au nez et à l’égo cassés. En silence nous traversons plusieurs couloirs jusqu’à arriver à mon bureau. Une fois à l’intérieur, je le libère de ses menottes et lui fait signe de s’asseoir avant de m’installer devant mon PC. La lèvre du jeune homme saigne encore un peu. Je me décide à ouvrir le carton pour en sortir un morceau de tissus dans lequel je fais tomber les glaçons de mon verre d’eau vide. « Tiens, mets ça sur ta lèvre, ça calmera l'inflammation » Je lui tends avant d’allumer mon PC. « Avant qu’on rédige le PV, si tu me disais ce qu’il s’est passé ? » Autant commencer par le début…

Elle a un air tellement sérieux cette demoiselle, mais contrairement aux autres, elle ne me prend pas de haut et ça fait du bien à vrai dire. « Je pense qu’il faudra plus de temps pour reconstruire son égo que son nez… » « Il s’est fait rétamer par un gosse avec un seul coup, j’veux bien croire que ça le fasse rager. » Je ris, j’aime son mordant et le fait qu’elle dise la vérité ! « Les apparences sont parfois trompeuses… Vu ton dossier déjà assez chargé, je suppose que tu connais l’étape suivante. » Et elle me fait grimacer, elle est pas sympa de balancer ça comme ça pour le coup, elle a même pas calculé que je lui ai dit qu’elle était belle, ou alors elle évite juste le truc. Bouarf, c’pas mignon. Je fais une petite moue avant de l’entendre me dire qu’on va dans son bureau. Ça me file un peu la trouille au début, parce que la seule fois où un flic m’a dit ça, il m’en a collé une pour me donner une bonne leçon selon lui… Mais elle a l’air d’être loin de ça. On avance avant de sortir par un coin que je n’ai jamais emprunté encore, mais je suis soulagé de voir qu’on ne passe pas devant les deux autres idiots à vrai dire. C’est plutôt une bonne chose pour moi et je la suis en trottinant comme un petit chiot adorable. Elle a une sacrée courbe… Elle est bien faite en fait. Je mords ma lèvre avant de grimacer violemment, puis de lécher le sang. ‘Tin, je suis con sérieusement.

Un nouveau siège plus confortable s’offre à moi et je m’y installe rapidement alors qu’elle me libère de mes menottes, me permettant de me masser les poignets. Fais chier… J’espère qu’ils vont pas me virer au O’Sullivan à cause de ça demain, j’ai trop besoin de ce boulot, j’en ai déjà perdu assez comme ça. C’est pas de ma faut si je tombe sur des abrutis à chaque coin de rue non ? « Tiens, mets ça sur ta lèvre, ça calmera l'inflammation » Je la regarde en papillonnant des yeux sous la surprise avant de prendre le tissu en murmurant un merci, pas habitué à ce qu’on s’occupe de moi et faut bien avouer que le droit sur ma lèvre me fait un bien fou, au point de me faire soupirer en fermant mes yeux. « Avant qu’on rédige le PV, si tu me disais ce qu’il s’est passé ? » Et là, là, elle me surprend encore. Elle était passée où depuis deux ans ? Sérieusement ? J’aurai aimé tomber sur un flic comme elle plus souvent. « J’ai trop de charisme ! Ils ont pas supporté ! » Je ris faussement avant de voir son air sérieux. J’peux pas plaisanter hein ? J’ai déjà un gros dossier entre les bagarres, les vols…

« Je marchais dans la rue encore en tenue de danse parce que la compagnie pour qui j’ai dansé ce soir m’a viré sans plus de cérémonie. Les types se sont arrêtés pour m’insulter à cause de ma tenue et du maquillage… Pour une fois, j’ai pas réagi, j’ai juste poursuivi ma route, mais ils sont sortis à 3 contre un ! » Je grogne. « Je suis resté debout quand même. » Et quelle fierté ! « Des passants ont appelé vos collègues, j’en ai frappé un en pensant que c’était encore un des types… et j’me suis retrouvé là, j’ai beau dire que j’ai été agressé, ils s’en fichent complètement, c’est pas grave, j’ai l’habitude. » Je croise les bras avant de grimacer à cause de mes côtes, puis de la regarder. « Merci… D’être sympa. » Je me frotte doucement les mains. « J’vais avoir des gros soucis ? »

Le fait de rencontrer Noah me fait davantage réaliser que le boulot à la brigade de protection des mineurs va être totalement différent mais pas moins intéressant. Il est loin des dealers et des indics que j’avais pour habitude de côtoyer. « J’ai trop de charisme ! Ils ont pas supporté ! » Il ne manque pas d’humour, et ce malgré la situation dans laquelle il se trouve. Néanmoins, il finit par me raconter ce qu’il c’est passé. Je suis forcée de constater qu’il n’a vraiment pas eu de chance. « Merci… D’être sympa. » Je lui adresse un petit sourire de réconfort. Il ne faut pas croire que tous les flics sont des enflures. « J’vais avoir des gros soucis ? » Je prends le temps de jeter un œil à son dossier avant de lui répondre. « Pour être honnête ton dossier risque de ne pas jouer en ta faveur. » Vu ses antécédents, il n’échappera pas à la garde à vu et à une convocation devant un juge. « Je suis obligée de te mettre en garde à vue pour le reste de la nuit mais avant toute chose je vais prendre ta déposition. » En silence, je m’affère sur mon PC pour tout préparer. Noah ne passera pas une très bonne nuit mais dès demain il sera relâché à la condition de respecter son interdiction de quitter la ville en attendant sa convocation. « Tu es prêt ? »

Pendant presque une heure, je rédige ses réponses au fur et à mesure qu’il répond à mes questions. LA rédaction d’un PV demande de respecter des critères bien précis, critères que je ne manque pas d’appliquer tout en réfléchissant à une solution pour le sortir de sa merde. Il a certes frappé un flic, mais c’était accidentel… Reste à le prouver… Je ne peux rien faire d’autre que relater les faits tels qu’il me les raconte. Je ne peux pas appuyer sur le fait qu’il était en légitime défense, ma fonction me l’empêche, mais une idée me vient en tête. Je termine le PV avant de l’imprimer et de lui poser devant lui. « Je te demanderais de le parapher et de le signer à la fin. » Je me lève avant de lui de revenir vers lui avec un verre d’eau que je lui pose devant. « Ce PV ne suffira pas à lui seul à t’éviter des ennuis. » J’attrape un morceau de papier pour qu’il me note les coordonnées exactes de l’endroit où c’est passé la bagarre. « Notes moi l’adresse exacte de l’endroit où tu as été agressé. » Vu son casier, les juges ne le croiront certainement pas, sauf si je trouve des témoins. «  Je vais t’accompagner en cellule de garde à vue et pendant ce temps là j’irais voir si je peux trouver des témoins de ce qu’il s’est passé. » Je ne comprends même pas que mon collègue ne l’ai pas déjà fait. C’est la base de tout. Je suis certaine qu’il a volontairement évité ce point là pour que le dossier contre Noah soit uniquement à charge. Sa façon à lui de se venger. Erreur qui pourrait lui couter cher…  « Si je trouve des témoins, je les convoquerais pour qu’il vienne faire une déposition, ce qui, vu ton dossier, t’évitera se gros ennuis. » Pour ce qui est de mon collègue, je n’aurais qu’à lui toucher un mot sur ses manquements et il se contentera d’affirmer que ce n’était qu’un accident… Situation qui va pas me faire apprécier de lui mais je m’en moque. Je suis là pour faire correctement mon boulot, par pour m’attirer les faveurs d’un flic véreux.  « Viens avec moi Noah. » Je lui fais signe de me suivre et ensemble nous quittons le bureau. Je le conduis jusqu’à la cellule de garde à vue qu’un collègue m’ouvre. Il n’y a personne à l’intérieur. «  Je vais demander à ce qu’une infirmière de garde vienne t’examiner. »  Je le regarde entrer. « Evites de trop jouer de ton charisme en mon absence. Je serais de retour dans quelques heures. » Je lui adresse un sourire avant de filer. J’entends mon collègue refermer la porte à clé. Me reste plus qu’à trouver des témoins de la bagarre. Avec un peu de chance, il s’en tirera s’en trop rien de méchant…

« Pour être honnête ton dossier risque de ne pas jouer en ta faveur. Je suis obligée de te mettre en garde à vue pour le reste de la nuit mais avant toute chose je vais prendre ta déposition. » Belle et sympa, mais un poil trop honnête. Ça fait chier putain, si je finis encore devant le juge, il va pas me louper avec les 18 ans même si je n’ai pas la majorité. J’ai quand même conscience des choses et à 18 piges, on est souvent considéré comme un adulte à part entière. Pourquoi c’est arrivé ce soir hein ? Je laisse ma tête se poser sur son bureau lentement avant de soupirer, puis de hocher la tête en essayant de lui raconter tout avec le plus de détails possibles. Normalement, j’m’en serai un peu foutu je crois, mais j’en ai marre d’avoir des soucis, surtout que dans l’histoire, je suis clairement la victime, mais je passe encore pour le connard parce que je me suis juste pas laissé faire.

Il faut au moins une heure pour tout rédiger, elle est consciencieuse, pas comme la plupart des gars ici. A force, je pourrais presque dire qui est qui. Je sais que j’ai frappé un Tom, qu’il y a un Jerry (véridique) et un Samuel avec Larry. Les flics ont toujours des noms pourris, mais pas le sien, il est joli. Quinn. Elle ressemble à une fleur délicate, mais je suis sûr qu’elle serait capable de me foutre à terre en moins de temps qu’il m’en faudrait pour dire pizza ! J’attrape le stylo qu’elle me tend dans une petite moue avant de signer où elle m’indique, puis de lui rendre, il est fini le bon temps hein ? « Notes moi l’adresse exacte de l’endroit où tu as été agressé. » J’attrape le papier avant de lui noter l’endroit puis de réfléchir. « Y’avait un restaurant pas loin, je crois que c’est là que quelqu’un a prévenu les flics. » « Je vais t’accompagner en cellule de garde à vue et pendant ce temps-là j’irais voir si je peux trouver des témoins de ce qu’il s’est passé. » Et je grimace fortement en entendant le mot « cellule », ça va être beau tient au boulot demain. Je hoche la tête doucement avec la furieuse envie de me pendre ou de fuir, dans les deux cas, ça n’arrangera rien. « Si je trouve des témoins, je les convoquerais pour qu’il vienne faire une déposition, ce qui, vu ton dossier, t’évitera se gros ennuis. » Et là, je hausse un sourcil de surpris tout en la fixant. Elle est sérieuse ? Elle veut vraiment m’aider comme ça ? Mon air de rebelle un peu superficiel au regard ténébreux s’effondre d’un coup, et je dois ressembler à un chiot larmoyant qui ne sait même pas la regarder dans les yeux. Dans tous les cas, lorsqu’elle me dit de la suivre, je le fais, mains dans les poches et tête baissée.

« Je vais demander à ce qu’une infirmière de garde vienne t’examiner. Evites de trop jouer de ton charisme en mon absence. Je serais de retour dans quelques heures. » Elle m’arrache un faible sourire alors que je lui tourne le dos pour entrer dans la cage et j’observe la porte se fermer. Je dois vraiment être considéré comme un bâtard d’animal aux yeux de tous ces hommes. Entre ceux qui m’abandonnent et ceux qui m’enferment… Et après, on se demande pourquoi je préfère les animaux à l’être humain ? Tous des crevards. Je détourne la tête avant de la hocher. « Faites attention. » On sait jamais, pas qu’elle ait des soucis pour ma gueule. Je vaux rien, elle a sûrement une jolie vie, ça sert à rien de la fissurer un peu pour une cause perdue. Je me laisse glisser le long du mur et l’infirmière arrive au bout d’une demi-heure pour nettoyer mes plaies, me mettre des crèmes et bander mes côtes en me disant qu’il faudrait passer une radio, que j’en ai une qui a dû être enfoncée dans la bagarre. Elle est marrante, comme si j’avais les moyens, en plus, je travaille à 10h le matin, j’ai pas le temps pour ça. J’articule un faible merci avant de me remettre assis sur le sol, somnolant, mais jamais endormi, ici, on sait jamais. Elles sont longues les heures sans la petite blonde. C’est nul et à part entendre au loin ces collègues déblatérer sur tout et rien, c’est vraiment pas l’éclate. Ils auraient pu me laisser mon téléphone… Des pas approchent, je me redresse en tenant mon torse en comprenant qu’elle revient et je souris un peu avant de venir contre les barreaux. « Alors ? Y’avait encore des témoins ? » Pour une fois que j’ai vraiment pas provoqué la chose, saloperie de karma.

Je sors du commissariat décidée à trouver un maximum de témoin. L’endroit ou a eut lieu la bagarre est toujours très animés et très fréquenté. Je suis certaine que je parviendrai à trouver des personnes qui auront assisté à la scène. Je ne sais pas pourquoi mais j’ai vraiment envie d’aider Noah à se sortir de ce merdier. Je ne le connais pas, et malgré un dossier peu encourageant, je ne parviens pas à voir en lui un voyou de bas étage. Je ne sais pas si c’est le fait d’avoir fréquenté les pires salopards de la Nouvelles Orléans quand j’étais aux stups, mais à côtés d’eux, Noah n’a rien de comparable… Peut être que je me laisse tout simplement attendrir par son visage d’ange, mais mon instinct me dis qu’il est loin de ce que reflète son dossier… Quoi qu’il en soit, je suis là pour faire mon boulot, et sans plus attendre je monte dans ma voiture pour rejoindre l’adresse qu’il m’a indiquée sur le bout de papier.

Il ne me faut pas plus d’un quart d’heure avant d’arriver à destination. Comme prévu il y a encore pas mal de monde dans ce quartier toujours animé. Entre les bars et les boites de nuit, il y a toujours du monde. Une fois mon véhicule de garer, je sors rejoindre les passants. Je ne sais pas combien de temps tout ça va prendre mais ce n’est pas grave… Prenant mon mal en patience, je sors ma plaque de flic avant de commencer à arrêter des passants pour les interroger…

Je ne saurais dire combien de temps il s’est passé quand je regagne ma voiture, mais je suis éreintée. La tâche n’a pas été simple et je rêve d’un bon café. Ce n’est qu’en arrivant au poste et en voyant l’aube se dessiner à l’horizon, que je comprends qu’il n’est pas très tard mais très tôt. En silence, je regagne la cellule de garde à vue ou Noah semble m’attendre. « Alors ? Y’avait encore des témoins ? » Dans son malheur il a eu de la chance finalement… « Oui, j’ai trouvé un petit groupe de trois personnes qui ont tout vu et qui doivent venir ce matin pour qu’on enregistre leurs dépositions. » Je fais signe à mon collègue de le laisser sortir. « Tu es libre de partir à la condition de ne pas quitter la ville et de te rendre à la convocation devant le Juge. » Il doit certainement le savoir mais l’usage m’oblige à lui redire. « Vu ton dossier tu auras certainement le droit une condamnation, mais elle sera minime grâce aux témoignages des personnes qui ont vu ce qu’il s’est passé. » Je fais signe à Noah de me suivre et je le conduis à l’accueil. Je lui tends un sac plastique ou se trouvent toutes ses affaires personnelles. Mon regard se pose un court instant devant sur l’horloge. Je viens de terminer ma première nuit de garde…  J’ai deux heures à tuer avant de rejoindre Jesse pour le petit déjeuner... Ensuite je reviendrais ici prendre moi-même les dépositions des témoins et ce n’est qu’après que je pourrais m’octroyer quelques heures de sommeil. « Ça va aller pour rentrer chez toi ? » Il a peut être 18 ans mais aux yeux de la loi il n’a pas encore l’âge de la majorité. « Je te dépose quelque part ? Je viens de terminer ma garde. »