Le grand jour est arrivé. Lori ne retient plus son excitation. Un mariage en petit comité avec sa grande famille et la grande famille de son futur époux, et deux ou trois amis qui servent de témoins et c'est tout. Préparée par les soins de ses sœurs volontaires, elle est à l'image de sa cérémonie : simple.

Le couple a choisi de se dire oui près du bayou. Dans ce froid polaire qui envahit la ville, les premiers flocons de neige et en ce dernier jour de l'année deux-mille dix-huit, ils ont pensé au plus inoubliable moment de leur vie. Quelque chose de privé, avec peu de monde. C'est ce dont Lori a toujours rêvé, faute d'avoir grandi auprès d'un trop grand nombre. Loin de l'agitation de ses missions humanitaires, elle a choisi sa deuxième maison pour sceller sa vie à une autre. Elle aurait voulu Paris, mais la distance et le temps depuis quand elle n'y est pas allée l'ont refroidie tout comme la météo ici.

Habillée d'une légère mais chaude et confortable veste en coton et d'une robe traditionnelle mais tout aussi simple, Lori s'avance finalement vers l'autel. C'est le grand moment, elle a du mal à cacher sa hâte. L'émotion se lit sur ses doux traits. Après toutes les difficultés qu'elle a traversé en amour, elle s'apprête à épouser un homme bien mais surtout l'homme qu'elle aime. Au loin, leurs regards se croisent et les battements de son coeur s'affolent. L'heure est bientôt venue...

Mariage neigeux, mariage heureux. Occasion spéciale pour jour spéciale, dressé d'un costard cravate, c'est au manchot que je ressemble le plus. Paralysé, terrorisé, je sens mon cœur s'accélérer. La chamade irrégulière, la chamade douloureuse, c'est ma vie de garçon que définitivement j'enterre. Excité, angoissé et stupéfait, j'ai dû mal à croire qu'on ait réussi à faire quelque chose d'aussi grand et aussi simple en même temps. Véritable décor des pires, ou des meilleures, comédies romantiques du siècle, ça m'a cloué le bec.

La voir déambuler, d'un pas léger, aussi belle que si elle volait, et mon cœur dégringole. Debout devant l'autel, je suis sans mot, j'aurais trop peur de lui voler la vedette. Tout est simple et dans ce nuage neigeux et cotonneux, je suis un homme heureux. La plus belle de toutes les femmes s'apprête à devenir mienne, j'en ai des vertiges. Elle interrompt sa marche nuptiale à ma hauteur, impériale allure et désinvolte sourire. Dans les nuées glacées, je lui murmure : Tu es magnifique mon amour.

Son souffle est court, coupé par l'émotion. Lori n'aurait jamais cru qu'un tel jour arriverait. Pas après toutes les épreuves qui se sont échouées sur son chemin. Le fait qu'elle puisse avoir droit à son grand moment, celui où peu importe le nombre de frères et de sœurs qu'elle a, peu importe le monde qui l'entoure, c'est elle qui est à l'honneur. C'est son jour. La neige rend le paysage plus que féérique. Elle aurait difficilement rêvé mieux. Quand tout le monde rêve de chaleur, d'été, de soleil et de robes courtes, Lori elle voit plus grand : elle rêve de château, de magie et de princesses. Elle n'a peut-être pas le château, mais elle a tout le reste.

Tandis qu'elle s'avance à pas de louve, d'une marche nuptiale, légère, elle a la sensation de voleter. Sa robe effleure doucement la neige provoquant un léger bruit. Le bruit sourd du silence. Elle ne ressent pas le froid s'engouffrer sous sa robe. Les couches lui donnent une impression de chaleur : il fait froid, c'est une pure folie que de se marier sous ce ciel blanc aussi menaçant que paisible, mais elle est heureuse et c'est la seule chose qui s'impose à son esprit.

Bientôt arrivée à la hauteur de son amant, prêt à devenir son époux, elle n'aurait pu être plus sourieuse. Le temps s'est ralenti. Elle sait que d'ici quelques minutes, le grand événement ne sera plus que le souvenir qu'on célébrera, mais elle veut penser que cet instant va durer encore et encore. Elle sera mariée à l'homme qui la rend heureuse, ce qui suffit à faire brûler continuellement son enthousiasme et sa flamme.

Elle est enfin arrivée et leurs mains s'effleurent. Il la complimente et son sourire grandit encore un peu plus. Elle va finir par avoir la mâchoir bloquée tant ses lèvres sont étirées.

- Tu n'es pas mal non plus, chéri.

Le prêtre commence alors son dialogue avant l'échange des vœux. Ce n'est pas Lori qui a tenu au côté religieux, c'est Jonathan. Tu n'y as pas mis de véto, mais tu aurais dû, le sermon semble durer une véritable éternité.

Boum boum, un tambour ou un souffle court, le cœur s'emballe et l'âme s'évade. Elle est là, elle est belle, elle est tout ce dont je rêve. Mon cœur s'éveille à l'égard de nos regards. Elle s'envole, chaque pas la rapproche de moi. Chaque pas la rapproche de nous. Un nous futur dont je ne saurais me passer. Faire l'impasse serait une véritable folie.

Les mots ont du mal à sortir, je m'efforce de ne pas rougir. Je n'ai pas peur de la situation, sa famille ne m'impressionne pas davantage. Petit comité, peu pour assister. Ce que je lui avais bien dit désirer. Tout est respecter, tout semble parfait. Je ne demanderai rien d'autre, trop ému par cet événement que j'attendais impatiemment.

Elle me complimente et je m'en vante. Pour moi-même. L'attention qui dévie, le prêtre dans son discours parti. C'était logique d'être là, avec elle à mon bras. Tandis qu'il arrête de parler, je fais face à ma belle pour la dévisager. C'est à mon tour de faire mon sermon. La gorge serrée, les yeux rivés, les mots m'échappent, les mots s'enfuient silencieusement. Lori Ann Bell. Je promets de faire de toi la femme la plus heureuse et la plus comblée du monde. De te soutenir dans les bons comme les mauvais moments, d'apprendre à t'aimer même quand je ne peux te supporter, de chérir la vie tant que c'est à tes côtés. Le souffle court, j'attend. C'est à son tour, j'entends.

Elle a du mal à retenir son émotion. Son visage, habituellement marbré, ne va pas tarder à ressembler à une fontaine ou à des chutes d'eau. L'émotion est d'autant plus grande en voyant sa famille. Les conflits qui les opposent sont suspendus dans le temps et, pour la première fois depuis très longtemps, il ne s'agit plus que d'elle. Les yeux rivés sur son moment, les gens qu'elle aime et les gens que son futur époux aime sont réunis au même endroit pour être les témoins de leur amour, ce qui signifie énormément pour elle.

Lori sait bien que ce jour va finir par passer et que ce si beau moment qu'elle est en train de vivre ne représente pas grand chose à l'échelle d'une vie, d'une vie de mariage. Elle a bien conscience que toute cette émotion finira par retomber et que chaque vidéo qu'on aura fait ne représentera pas vraiment ce qu'elle aura vécu. Elle comprend aussi bien les enjeux de ce mariage. Tout cet argent dépensé, toute cette organisation et ce temps quelque part perdu à mettre en place. C'est seulement le résultat qui importe.

Des frissons lui parcourent le corps et son estomac fait des bonds dans le vide. Elle a envie de vomir tant sa tête tourne pendant qu'il lui fait ce qui ressemble à une déclaration d'amour, mais qui n'est finalement qu'un discours de vœux de mariage. Ca lui convient aussi, Lori n'est pas une femme très compliquée quand il s'agit d'amour.

- Jonathan Roy, aujourd'hui, c'est le jour où nous scellons notre amour devant les gens les plus importants dans nos vies. Des gens qui ont marqué ma vie comme tu as marqué la mienne. C'est grâce à ta patience et à ton amour que nous en sommes aujourd'hui là et c'est pour ça que je t'aime en retour. Je suis très fière de devenir ta femme, je promets de te chérir un peu plus chaque jour, pour le meilleur et pour le pire.

En cet instant le temps semble suspendu et moi, je suis tout sauf perdu. Je suis face à elle, mon cœur battant de plus belle. Tout est parfait, je suis comblé. Le prêtre prend la relève, c'est à son tour de jouer les poètes. Sa bible devant lui, je ne vois même pas le livre qu'il brandit. C'est l'esprit dans le vague que je tente de ne pas divaguer.

Son discours a fait son effet, je ne pourrais sans doute jamais l'oublier. Et les caméras de mes sœurs ne pourront que m'en empêcher. Ces images seront gravées à jamais sur une bande défilante que nous regarderons sans doute des années plus tard, entourés de tous nos rejetons.

J'écoute le prêtre, je prête attention, j'essaie d'être présent de corps et d'esprit. Mais je n'arrive qu'à entendre un "jusqu'à ce que la mort vous sépare" ? C'est à moi qu'il s'adresse. Veux-je prendre cette splendide créature comme épouse et maîtresse ? C'est pour cette raison que nous sommes là. Je prends une grande inspiration. Je n'ai pourtant pas besoin d'être inspiré pour y répondre. Oui, je le veux. Le sourire aux lèvres, j'attends qu'elle me relaye. Le bonheur se lit dans ses yeux, certainement dans les miens aussi. Et avant tout, il remplit mon cœur.

Jamais Lori n'aurait pensé vivre un tel moment d'exception. L'amour, elle a longtemps cru qu'elle n'y avait pas droit, qu'elle en était exemptée. Aujourd'hui, les choses ne sont plus les mêmes et elle voit la vie différemment. Elle se voit déjà au bras de Jonathan, une ribambelle d'enfants autour d'eux. Et elle espère qu'ils seront des meilleurs parents que ce que son père et sa mère l'ont été. Elle n'a rien à reprocher à sa mère, mais les cachotteries de son père, leurs disputes, elle n'en veut pas dans sa vie à venir. Lori n'a aucun mal à donner le change, cette image de perfection dans sa vie, surtout en ce si fabuleux jour pour elle. Elle ne souhaite pas que cela change.

Elle est absorbée par le moment présent, si fortement qu'elle en oublie presque où elle est, pourquoi elle est là ? Et puis la voix de Jonathan la ramène aussitôt les pieds sur Terre. Elle lie sa vie à la sienne, rien ne pourrait être plus important que cet instant. L'émotion est forte, elle est grandiose, mais la dominatrice qu'est la Bell qui s'apprête à renier son nom sait se contrôler.

Il n'a pas fait de grand vœux, elle s'en doutait. Elle le connaît, à force. Même lorsqu'il n'étaient que deux amis, elle voyait qu'il n'était pas le genre à s'étendre. Elle ne s'attendait pas à si court néanmoins et ça la fait sourire. Elle, elle a dit ses vœux, mais elle n'est pas allée droit au but, comme lui. Alors, le prêtre se tourne vers elle à nouveau. Dans sa précipitation, elle en oublie de le laisser parler.  - Oui, je le veux ! s'exclame telle à grand vitesse, laissant s'esclaffer l'assemblée. Ses joues sont rosies par la gêne, mais elle ne va pas s'excuser. C'est son jour, elle peut.

Mon cœur fait des bonds, j'ai du mal à croire à mon bonheur. Un peu comme s'il n'était pas façonné pour moi, et pourtant c'est moi qui suis là. Ma belle devant mes yeux, je ne pourrais être plus heureux. Mes proches autour de nous réunis, c'est un peu tout qui me sourie : la chance, le bonheur, la joie, le plaisir. Tout. Je ne suis pas certain d'y avoir droit, mais je m'en contente parfaitement.

Partager, donner, mais recevoir. Je sais très bien que ce moment va se terminer aussi brutalement que ce qu'il a été long à préparer. Mais je ne peux que me délecter de celle que je suis en train d'épouser. De cette cérémonie. De cette nouvelle vie.

Le prêtre ne sourcille pas, ça n'étonne que moi. Il doit avoir l'habitude de toutes ces déclarations de servitude. Car oui, à ma femme je serai soumis mais sans aucune infamie. Vous pouvez embrasser la mariée. Ma femme. Je ne me fais pas prier. Et pendant que nos lèvres se rejoigne, je ne pense qu'à une seule chose, que j'extériorise aussitôt. Je t'aime mon amour.

Jamais Lori n'aurait pensé vivre un tel moment d'exception. L'amour, elle a longtemps cru qu'elle n'y avait pas droit, qu'elle en était exemptée. Aujourd'hui, les choses ne sont plus les mêmes et elle voit la vie différemment. Elle se voit déjà au bras de Jonathan, une ribambelle d'enfants autour d'eux. Et elle espère qu'ils seront des meilleurs parents que ce que son père et sa mère l'ont été. Elle n'a rien à reprocher à sa mère, mais les cachotteries de son père, leurs disputes, elle n'en veut pas dans sa vie à venir. Lori n'a aucun mal à donner le change, cette image de perfection dans sa vie, surtout en ce si fabuleux jour pour elle. Elle ne souhaite pas que cela change.

Elle est absorbée par le moment présent, si fortement qu'elle en oublie presque où elle est, pourquoi elle est là ? Et puis la voix de Jonathan la ramène aussitôt les pieds sur Terre. Elle lie sa vie à la sienne, rien ne pourrait être plus important que cet instant. L'émotion est forte, elle est grandiose, mais la dominatrice qu'est la Bell qui s'apprête à renier son nom sait se contrôler.

Il n'a pas fait de grand vœux, elle s'en doutait. Elle le connaît, à force. Même lorsqu'il n'étaient que deux amis, elle voyait qu'il n'était pas le genre à s'étendre. Elle ne s'attendait pas à si court néanmoins et ça la fait sourire. Elle, elle a dit ses vœux, mais elle n'est pas allée droit au but, comme lui. Alors, le prêtre se tourne vers elle à nouveau. Dans sa précipitation, elle en oublie de le laisser parler.  - Oui, je le veux ! s'exclame telle à grand vitesse, laissant s'esclaffer l'assemblée. Ses joues sont rosies par la gêne, mais elle ne va pas s'excuser. C'est son jour, elle peut.